Verdict en demi-teinte dans le procès ivoirien du "Probo Koala"

A l’issue de trois heures de délibérés, la cour d’assises de Côte d’Ivoire a condamné, mercredi soir 22 octobre , à vingt et cinq ans de prison deux accusés dans l’affaire du déversement à Abidjan, en août 2006, de 528 m3 de résidus (un mélange d’essence, soufre, soude caustique, à forte concentration en mercaptan) issus du nettoyage des cales du Probo Koala, un navire spécialisé dans le transport d’hydrocarbures affrété par la société Trafigura. Selon la justice, cette pollution avait provoqué la mort de 17 personnes et des milliers d’intoxications.
La cour d’assises a condamné à vingt ans de prison et dix ans d’interdiction de séjour sur le territoire Salomon Ugborugbo, le patron de la société Tommy qui avait déversé les résidus à l’air libre – il est le seul à être poursuivi pour empoisonnement. Elle a également condamné à cinq ans de prison et dix ans de privation de droits civiques Essoin Kouao, un agent de la société consignataire du Probo Koala au port d’Abidjan, poursuivi pour complicité d’empoisonnement.
Il lui était reproché d’avoir fourni les coordonnées de Tommy à la filiale ivoirienne de Trafigura, Puma Energy, pour décharger à Abidjan les résidus du Probo Koala, alors que cette entreprise n’avait aucune capacité pour retraiter ces déchets et s’était contentée de les déverser dans une décharge publique et dans une quinzaine de sites d’Abidjan.


SEPT ACQUITTÉS

Le jury a par ailleurs désavoué l’enquête judiciaire en acquittant les sept autres accusés, alors que l’avocat général avait requis vingt ans de prison pour cinq d’entre eux. La plupart étaient pourtant poursuivis aussi pour complicité d’empoisonnement. La cour a ainsi acquitté le commandant du port, l’ancien directeur général des affaires maritimes au ministère des transports et trois douaniers. Pour le directeur technique de la société consignataire et un de ses subordonnés, également renvoyés devant les assises, l’avocat général avait demandé l’acquittement.
Les sept acquittés ont probablement profité de l’absence de Trafigura sur le banc des accusés suite à un accord à l’amiable conclu en février 2007 avec l’Etat de Côte d’Ivoire, dans lequel la multinationale s’était engagée à débourser 100 milliards de francs CFA (152 millions d’euros) d’indemnisation. Au lendemain de cet accord, trois cadres de la société, incarcérés à Abidjan, avaient été libérés. La défense accusait Trafigura d’avoir délibérément trompé ses interlocuteurs qui croyaient, selon elle, avoir affaire à des résidus ordinaires, à savoir des "eaux usées". "Il faut que justice soit rendue, les Ivoiriens veulent savoir la vérité", a affirmé l’avocat de Salomon Ugborugbo, promettant de se pourvoir en cassation pour son client.

Le Monde, AFP, 23.10.08


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