Queen Mary 2 : neuf condamnations requises

Au procès en appel du drame de la passerelle, l’avocat général a requis des peines d’un an à trente mois de prison avec sursis à l’encontre de sept salariés. Peine maximale requise aussi contre Endel et Chantiers.

Ils avaient tous été mis hors de cause en février 2008 par le tribunal correctionnel de Saint-Nazaire. Hier, pendant deux heures trente, huit hommes, salariés d’Endel et des Chantiers de l’Atlantique, ont écouté l’avocat général de la cour d’appel de Rennes disséquer les nombreuses négligences qui ont conduit à l’effondrement de la passerelle du Queen Mary 2. C’était le 15 novembre 2003, à Saint-Nazaire.

Au terme d’un réquisitoire précis, Jean-Luc Desport a demandé la condamnation de sept d’entre eux à des peines allant d’un an à trente mois de prison avec sursis. Selon lui, seul le chef du service Sécurité-hygiène-environnement des Chantiers doit bénéficier de la relaxe, « parce qu’il n’avait pas de pouvoir décisionnel ».

Chef d’antenne d’Endel, concepteur de la passerelle, monteur seront-ils pour autant condamnés, cette fois ? Et le chef de bord, l’ingénieur méthode-logistique qui aurait dû contrôler la commande de la passerelle ? Peut-on affirmer qu’ils ont commis « des fautes caractérisées », élément clé du dossier pour établir leur culpabilité ? « On ne fait pas passer des personnes sur un pont de 15 mètres de long sans se rendre compte que, si l’on est fautif, cela va entraîner un risque pour autrui », avance l’avocat général.

« On ne contrôle pas, on fait confiance »

L’avocat général demande enfin la condamnation à la peine d’amende maximale des deux entreprises poursuivies en tant que personnes morales. Chez Endel, « on ne me fera pas croire qu’on ne pouvait pas se douter que la passerelle ne servirait pas au personnel ». Réponse de Me Thierry Dalmasso dans une défense technique étayée : « La destination de la passerelle est un élément de la commande. Elle a été détournée de sa fonction. »

Pour les Chantiers de l’Atlantique, l’avocat général pointe « l’incapacité à expliquer la chaîne des responsabilités ». Pour lui, le chantier naval « aurait dû être classé ERP (Établissement recevant du public) et donc répondre à des obligations de contrôle et de conformité. Craignait-on que la visite d’organismes agréés ne retarde la construction ? »

Une vision contestée par Me Patrick Maisonneuve, avocat des Chantiers. Sollicitée, « même la préfecture ne l’a pas jugée utile ». Dans une habile plaidoirie, laissant entendre que soit les entreprises, soit les hommes doivent être condamnés, il a insisté sur « le contrat de confiance » entre le donneur d’ordres et le sous-traitant.

L’avocat général avait anticipé cet argument et mis les prévenus en face d’une triste réalité : « Aux Chantiers, on ne contrôle pas, on fait confiance. » Et se tournant vers les rescapés ou les proches des seize personnes tuées, au fond de la salle : « Ceux-là, heureux de monter sur le Queen Mary 2, vous ont fait confiance. Vous avez failli à votre mission. »

Le procès se termine aujourd’hui avec les dernières plaidoiries de la défense.

Frédéric SALLE

Ouest-France - 2 avril 2009

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