Fils d’une victime de l’attentat du Bardo : « Ne rien savoir est insupportable »

En mars 2015, des terroristes ont tué 24 personnes dans le musée du Bardo, à Tunis. Parmi les victimes, Nadine Flament et Jean-Claude Tissier, coiffeurs en retraite du sud du Tarn. Leurs proches ne savent rien de l’enquête et s’impatientent.

« En septembre avec d’autres familles de victimes, nous avons été reçus à l’Elysée par François Hollande. Il nous a écoutés, longuement. Seulement, à la fin je lui ai expliqué droit dans les yeux qu’il était le seul à pouvoir faire bouger les choses. Il nous a promis d’agir. Six mois ont passé et nous ne savons toujours rien ! »

Marc Lamandin respire profondément, se calme. Demain, avec sa sœur et son beau-frère, il participera à la cérémonie prévue aux Invalides à Paris, deux ans après l’attentat du musée du Bardo, à Tunis. Le 18 mars 2015, en fin de matinée, des terroristes de l’État islamique avaient tiré dans la foule armés de fusils automatiques Kalachnikov, assassinant 24 personnes dont 21 touristes français.

Parmi eux, Jean-Claude Tissier, 71 ans et sa compagne, Nadine Flament, 68 ans, la mère de Marc Lamandin. Coiffeurs en retraite, ils vivaient à Aussillon, dans le sud du Tarn. « Ils effectuaient une croisière autour de la Méditerranée, heureux. De leurs morts, de leurs exécutions, on ne sait presque rien. Aujourd’hui, tout cela ne déclenche plus vraiment la colère qui a bien sûr existé dans les premiers mois. Ce qui domine maintenant, c’est une immense frustration. Celle de ne pas savoir avec le sentiment, terrible, que personne ne fait avancer les choses », dénonce ce fils en colère.

Frustration « insupportable »

Un homme bien décidé à profiter de la cérémonie aux Invalides pour faire passer des messages.

« Les cérémonies, c’est très bien. Mais moi, nous avec l’association des victimes du musée du Bardo, nous voulons que la justice avance. Nous avons compris que la Tunisie ne voulait pas trop s’exprimer mais en France, que fait la justice ? Où en est l’enquête ? Quel acte la juge d’instruction du pôle antiterroriste de Paris a-t-elle demandé ? Avons-nous le droit de savoir ? »

Une frustration qualifiée « d’insupportable » par Marc Lamandin d’autant que les avocats, Mes Emmanuelle Franck et Alexandre Martin, ne disposent pas davantage d’information sur l’instruction en cours (lire l’encadré).

« Au début de l’information judiciaire, nous avons reçu un CD-ROM avec quelques photos et les premiers procès-verbaux. Depuis plus rien. De ne pas savoir, de ne pas comprendre ce qui s’est réellement passé, n’aide pas à passer à autre chose, à vivre tout simplement. »

Une difficulté pour les proches des victimes mais également pour ceux qui, comme le président de l’association, ont réussi à quitter le musée tunisien vivant. « Serge Mayet, notre président, a subi l’attentat. Physiquement il va bien comme son épouse. Psychologiquement c’est très difficile. Pourtant il se débat. Quand même l’État doit nous aider, utiliser la diplomatie. Ne pas savoir, ce n’est simplement pas supportable. »

Dossier « presque vide »

Décidé à profiter de la cérémonie de demain aux Invalides pour se faire entendre, Marc Lamandin a demandé à ses avocats toulousains de l’accompagner. « Nous allons en profiter pour regarder le dossier », sourit Me Alexandre Martin qui ne s’attend pas « à de grandes découvertes. Il est presque vide ». Une juge d’instruction a été nommée ainsi qu’un magistrat de liaison pour faciliter les relations entre les justices tunisienne et française. « La juge d’instruction a reçu les familles voilà environ un an. Depuis, plus de nouvelle », note Mes Franck et Martin. On peut comprendre le désarroi de nos clients même si on connaît la difficulté de ces dossiers. »

Source : ladepeche.fr
Auteur : Jean Cohadon
Date : 17 mars 2017

Crédit photos : Source : ladepeche.fr Auteur : Jean Cohadon Date : 17 mars 2017

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