Brétigny : la SNCF contrainte au rapport

La divulgation, hier par le Figaro, d’éléments d’un rapport confidentiel de la SNCF sur l’accident de Brétigny-sur-Orge (Essonne) a forcé l’entreprise à sortir du bois. Elle a donc publié son rapport d’enquête interne, qu’elle avait remis à la justice le 22 juillet, soit dix jours après le déraillement qui a fait 7 morts.

Les cheminots n’ont pas tardé à réagir. Le syndicat SUD s’étonne qu’un tel audit ait pu avoir lieu sans que les instances représentatives du personnel en aient été informées. Henri Gillard, membre du CHSCT et syndicaliste SUD, rappelle que cette instance a désigné un cabinet d’expertise et que le travail d’analyse vient de commencer. « S’il s’avère que la direction a des éléments que nous n’avons pas, ce n’est pas acceptable », prévient-il.

Selon le rapport, il manquait un boulon et un écrou sur le trou 3 de l’éclisse (pièce métallique qui relie deux rails d’un aiguillage). Le rapport émet l’hypothèse, compte tenu des traces d’oxydation relevées, qu’il est « très probable que l’absence du boulon numéro 3 est sensiblement antérieure au déraillement ». Or, un examen de l’aiguillage effectué huit jours avant l’accident n’avait rien relevé d’anormal. D’où une mise en cause en pointillé du travail de vérification de l’agent.

Ce dont s’insurge Roger Dillenseger, de l’Unsa. Il souligne que le rapport divulgue en fait un secret de polichinelle : « D’après les éléments dont nous disposions, et selon nos observations des photos de l’éclisse, l’oxydation du trou 3 était bien visible et l’absence de boulon plus que probable. »

Il ajoute que ce « n’est pas rare. Ce peut même être acceptable et cela n’a jamais fait dérailler un train ». Même remarque à propos des fissures constatées près des trous : « L’arbre des causes dans ce type d’accident est toujours plus complexe que la mise à bout de quelques éléments. Il ne faudrait pas faire condamner des lampistes, comme c’est souvent le cas dans les accidents industriels. »

De son côté, Georges Holleaux, avocat de la Fédération nationale des victimes d’accidents collectifs, partie civile dans l’affaire, juge « scandaleux qu’un problème de structure, comme ce défaut de nivellement des voies constaté avant l’accident au niveau d’un pont situé à proximité de l’aiguillage, a été évacué d’une ligne par la SNCF dans son rapport ». Il a écrit le 21 août aux juges d’instruction pour leur demander de tirer cette piste au clair.

libération.fr avec Catherine Maussion et Yann Philippin - 23 septembre 2013


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