PROCES DES ATTENTATS DU 13 NOVEMBRE 2015 I J9 : DESCRIPTION DES PREMIERES CONSTATATIONS REALISEES SUR LES TERRASSES DE LA BELLE EQUIPE ET DU COMPTOIR VOLTAIRE

L’audience reprend à 13H12.

Le président commence par entendre sous le statut de témoin anonyme, le commandant de la brigade criminelle de Versailles en charge des constatations de la scène de crime de la fusillade de la terrasse de la « Belle Équipe ».

Il explique que le 13 novembre 2015 à 23 heures, il a été saisi par la sous-direction antiterroriste du parquet de Paris. Ils ont commencé à travailler à une heure du matin sur les lieux et y sont retournés les jours suivants pour poursuivre leurs constatations. Le commandant décrit une ambiance particulièrement pesante.

Une vidéo prise par un témoin d’un immeuble voisin depuis le 6ème étage est ensuite diffusée. L’objectif est de comprendre l’attentat à travers ces images, explique le policier. Bien que la totalité de la scène ne soit pas filmée, elle permet de saisir l’ampleur tragique et la violence de la fusillade de par la stridence du son notamment.

On y aperçoit deux terroristes en train de tirer avec des fusils d’assaut en direction de la terrasse de « la Belle équipe » avant de remonter dans une voiture noire. Ils ne sont pas cagoulés et tirent également sur des véhicules en circulation. Les individus ont alterné entre des tirs isolés et des tirs en rafales. On entend également l’un d’eux crier « allahu akbar ». Des éléments vestimentaires des deux terroristes vont également être déterminants pour leur identification par la Sous-Direction Antiterroriste, tels que les chaussures oranges d’un des assaillants.

Il rappelle que les trois individus armés ont été identifiés comme étant : Brahim Abdeslam, Abdelhamid Abbaaoud et Chakib Akrou.

Ce soir-là, le témoin précise que les policiers ont remis un total de 128 étuis percutés. Puis, le travail de la brigade s’est également concentré sur la recherche d’éléments d’impacts sur les lieux de l’attaque. Cela a permis de conclure que la terrasse était bien ciblée. Il estime qu’il y a eu 164 coups de feu environ. L’ensemble de ces tirs a été réalisé par trois armes différentes de type Kalachnikov, par trois tireurs.

Les policiers procèdent également aux constatations sur les victimes décédées. Celles-ci sont concentrées et enchevêtrées sur la terrasse. Pour chacune d’entre elles, le drap qui les recouvre a été relevé pour pouvoir réaliser une description précise. Les vêtements ont également été soulevés pour constater les blessures. Tous les éléments prélevés sur les victimes ont été placés sous scellés, notamment les affaires personnelles. Il rappelle que toutes les blessures sont par balles. Une fois ces constatations faites, les victimes ont été confiées au service funéraire de la ville de Paris. Toutes les précautions ont été prises pour respecter leur dignité, souligne-t-il.

Cette attaque a causé la mort de 21 personnes, dont deux d’entre elles à l’hôpital. Le commandant prend le soin de rappeler l’identité de chacune d’entre-elles : Anne-Laure ARRUEBO, Macéthéo BOUMBAS, Ciprian Lonut CALCIU, Cécile COUDON PECCADEAU DE L’ISLE, Marie-Ainée DALLOZ, Romain DIDIER, Justine DUPONT, Romain FEUILLADE, Véronique GEOFFROY épouse LAGACHE DE BOURGIES, Michelli GIL JAIMEZ, Cédric GINESTOU, Thierry HARDOUIN, Djamila HOUD, Hyacinthe KOMA, Guillaume LEDRAMP, Lamia MONDEGUER, Victor MUNOZ, Halima SAADI épouse N’DIAYE, Lacriminioara POP, René BICHON et Hodda SAADI.

En plus des victimes décédées, l’attaque a fait une vingtaine de blessés. Ce soir là, une grande partie des personnes présentes se connaissaient car deux anniversaires étaient célébrés. Le personnel du bar était composé de deux serveuses, un barman et de deux personnes en cuisine.

Après l’intervention de l’ensemble des acteurs du procès afin d’éclairer sur cette terrible scène de crime, Salah ABDESLAM prend la parole : « Bonjour à tous, je souhaite commenter la vidéo présentée. Je voudrais dire que si l’on sort les images de leur contexte, je suis le premier à les désapprouver. Mais si on les met dans leur contexte, je ne peux les condamner. Il y a des français, des allemands, des belges et d’autres personnes de différentes nationalités de confession musulmane. Ces personnes ont immigré vers la Syrie pour leur religion. Les français les ont assassinées. La France les a massacrées. Si la France compte ces morts, nous, nous avons arrêté de les compter. Le 13 novembre était inévitable. Par contre, vous pouvez éviter de nouveau un 13 novembre et c’est pour cela que je parle de dialogue ».

Devant la sidération des personnes présentes à l’audience, le Président lui rétorque : « Monsieur Abdeslam, il y a une nouvelle fois de la provocation dans votre discours. Quand on tire avec des kalachnikovs sur des gens en terrasse, ce n’est pas comme ça que l’on dialogue ».

Salah Abdeslam rétorque : « Quand les enquêteurs font leurs exposés, ce sont les dernières pages d’un livre mais il faut lire le livre en entier. Ces terroristes sont mes frères ».

Le Président l’interrompt : « Oui, ça on avait compris. Merci Monsieur, on va faire une suspension d’audience ».

A la reprise à 16h13, un nouveau témoin anonyme prête serment à la barre. Il s’agit de l’ancien commandant de la brigade criminelle de Lille chargé de la réalisation des constatations sur la scène de crime du bar « Le Comptoir Voltaire ». Il explique avoir été contacté le soir du 13 novembre pour composer une équipe d’enquêteurs et se rendre sur place.

Concernant les opérations menées, l’enquêteur précise qu’elles ont débuté à 4h15. Sur cette scène, aucun mort n’est à déplorer, excepté le terroriste, dit-il. Il a cependant été fait état de deux blessés graves : un client proche de l’explosion et une serveuse.

Le policier explique s’être servi de la vidéo enregistrée à l’intérieur du « Comptoir Voltaire » pour l’approfondissement de son enquête. Cette vidéo sans son est montrée à la Cour. On peut y apercevoir le terroriste entrer d’un pas décidé pour se rendre dans la partie du bar où il y a le plus de personnes. Il est alors interpelé par la serveuse lorsqu’il active sa ceinture explosive.

S’agissant des constations sur le kamikaze, il est notamment retrouvé des morceaux de ruban adhésif. Des traces de réanimation sont également présentes en raison des soins réalisés par les primo intervenants : un médecin et un pompier retraité n’ayant pas réalisé qu’il s’agissait du terroriste. Puis, l’équipe de déminage a procédé à la désactivation de la ceinture. Les empreintes prélevées sur le corps du terroriste permettront d’identifier dans la journée du 14 novembre qu’il s’agissait de Brahim Abdeslam.

Concernant le matériel explosif, une pile est retrouvée. Elle a notamment servi pour la mise à feu. Des cordelettes blanches et un sac artisanal permettant de stocker des boulons sont également retrouvés. 58 impacts sont constatés sur la terrasse et l’immeuble voisin.

A la fin des questions de l’ensemble des acteurs du procès, le Président suspend l’audience, il est 17h15.

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