Tunisie : verdicts attendus dans les procès du Bardo et de Sousse

Les procès des attentats de 2015 en Tunisie contre le musée du Bardo et un hôtel de Sousse, lors desquels des dizaines de touristes étrangers avaient été tués, touchent vendredi à leur fin, apportant des réponses incomplètes sur les responsabilités.

Après une dizaine d’audiences réparties sur un an et demi, les dernières plaidoiries ont eu lieu en matinée devant la cinquième chambre du tribunal de première instance de Tunis, dernière étape avant un verdict au moins partiel.

Le juge a levé la séance en début d’après-midi, disant que les délibérations dans les deux affaires allaient débuter.

Selon plusieurs avocats de la défense, le tribunal prononcera "probablement" ses verdicts dans les deux procès dans la nuit du vendredi à samedi.

Les deux procès sont suivis avec une grande attention dans plusieurs pays européens dont étaient originaires de nombreuses victimes.

Vingt-deux personnes —un agent de sécurité tunisien et 21 touristes— avaient été tuées dans le musée du Bardo, à Tunis, le 18 mars 2015. Parmi elles, quatre Français, quatre Italiens, trois Japonaises et deux Espagnols.

Touristes étrangers tués

Trois mois plus tard, 38 touristes —dont 30 Britanniques, des Irlandais, des Allemands et un Belge— avaient péri dans l’attentat de Sousse (est).

Les dépositions des accusés lues lors des précédentes audiences ont mis en évidence d’importants liens entre les deux attentats, tous deux revendiqués par le groupe jihadiste Etat islamique (EI).

Certains accusés désignent un même homme, Chamseddine Sandi, comme le cerveau des attentats. Poursuivi dans les deux affaires comme d’autres accusés, ce suspect aurait été abattu en 2016 dans un raid américain en Libye, selon des médias tunisiens.

Dans le procès du Bardo, au moins 25 personnes, dont 22 en détention provisoire, sont poursuivies. Vingt et une d’entre elles, dont deux femmes, étaient présentes vendredi au tribunal, a constaté une journaliste de l’AFP.

Lors de cet attentat, le premier en Tunisie à être revendiqué par l’EI, les deux assaillants avaient également blessé 43 personnes, avant d’être abattus par les forces de sécurité.

Les investigations ont montré la présence d’amphétamines dans le corps de l’un des tireurs : Yassine Laabidi né en 1990. Le deuxième assaillant, Jaber Khachnaoui, né en 1994, s’était rendu en Syrie en décembre 2014 en passant par la Libye.

Dans cette affaire, un des accusés, Mahmoud Kechouri, a affirmé avoir préparé des plans et gardé des téléphones à la demande de Chamseddine Sandi, un ami. Il a également dit avoir préparé des cartes du musée, en détaillant notamment les cibles envisagées.

Cet ouvrier de 33 ans a justifié son aide "comme un devoir pour participer à l’émergence du califat" autoproclamé par l’EI en 2014, selon ses dépositions lues à l’audience.

Mais rares sont les dépositions à avoir apporté un réel éclairage sur les faits.

Nombre d’accusés sont uniquement poursuivis pour avoir été en contact via une application de messagerie avec d’autres suspects en fuite.

"On sait qu’il y a un organisateur central et deux tireurs, mais la motivation intime des accusés ne semble pas intéresser le tribunal, et les débats sur les faits sont restés très courts", déplorait récemment un des avocats des victimes françaises, Gérard Chemla.

"Reconnus comme victimes"

L’audience de vendredi a été retransmise en direct dans une salle d’audience à Paris et en Belgique. Les trois précédentes avaient été retransmises en direct à Paris en présence de parties civiles françaises.

"Le procès leur aura permis, en organisant la visioconférence et en laissant la parole à des avocats choisis par les victimes, d’avoir enfin été reconnus comme victimes par l’Etat tunisien", a souligné Me Chemla.

L’attentat de Sousse, où 30 Britanniques avaient été tués, fait aussi l’objet d’une procédure devant la Cour royale de justice de Londres, visant à reconstituer les faits avérés.

Le 26 juin 2015, Seifeddine Rezgui, un étudiant, avait abattu des touristes sur la plage avant de pénétrer dans un hôtel où il a continué à faire feu à coups de grenade et de kalachnikov. Il avait fini par être abattu.

Quarante-quatre personnes au total sont poursuivies dans le cadre de cette affaire, dont six membres des forces de sécurité accusés de "non assistance à personne en danger".

Les autres répondront de "crimes terroristes", "homicide" et "complot contre la sûreté de l’Etat", selon le parquet.

Les accusés sont jugés en vertu d’une loi antiterroriste adoptée à l’été 2015. Ils sont passibles de la peine capitale, mais cette sentence fait l’objet d’un moratoire depuis 1991 en Tunisie.

Source : Courrier International
Auteur : La Rédaction
Date : 08/02/2019

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