Risques industriels : les leçons de la catastrophe AZF ont été trop longues à tirer

Il aura fallu près de quinze ans pour boucler les cartes des zones riveraines des sites industriels à risques. Résultat, les mesures de mise en sécurité des riverains commencent tout juste à être mise oeuvre.

Sur le papier tout est en règle ou presque. Quinze ans après la catastrophe AZF à Toulouse, qui a donné lieu mardi à la condamnation à 15 mois de prison avec sursis du directeur du site et une amende maximum pour la société d’exploitation, les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) industriels institués sont opérationnels dans 92 % des cas. Sauf qu’il aura fallu pas loin de quinze ans pour installer ce dispositif de mise en sécurité des populations riveraines d’environ 500 usines classées Seveso . Et les moyens financiers pour enclencher cette mécanique héritée de la loi Bachelot de juillet 2013 ont mis presque autant de temps à arriver que la justice à se prononcer.

Dans le périmètre de ces plans de prévention des risques, il n’est pas seulement interdit de construire : la loi impose également d’exproprier quand le risque est jugé mortel. Et si ce n’est pas le cas, des travaux de protection (renforcement des fenêtres, pièces de confinement, etc.) s’y imposent. Tout cela a un coût. Les particuliers, qui n’ont eu longtemps droit qu’à un crédit d’impôt de 15 % du montant des travaux, ne se sont pas précipités. A force de financements complémentaires, le reste à charge est tombé à 10 %. Mais ce n’est que depuis récemment.

« La mise en oeuvre commence à peine », déplore un expert. A ce jour, seulement 17 expropriations ont pu être menées à bien et 58 foyers ont pu faire valoir leur droit de délaissement sur leur habitation. C’est environ à 10 % de ce qu’il est prévu de faire à l’échelle des 392 PPRT.

Beaucoup d’incompréhension sur le terrain

L’Etat, les collectivités locales et les industriels, qui doivent conclure des conventions de financement dans les PPRT, ont mis du temps à se comprendre. Les collectivités, notamment, manquaient d’expertise. C’est moins vrai désormais. Du côté des industriels, « beaucoup de travail a été fait pour réduire les risques », estime Yves Blein, ancien maire de Feyzin , député PS du Rhône et président d’Amaris, une association qui réunit les collectivités d’accueil d’industries dangereuses. La loi les oblige à envisager tous les scénarios catastrophes et à les prévenir, ici avec des coupe-circuits, là avec des bacs de rétention à double-coque.

Il y a eu des progrès au niveau de la prise de conscience des industriels. Mais sur le fond, il n’y a toujours pas de culture du risque industriel en France. AZF n’a rien changé.

« Il y a eu des progrès dans la prise de conscience des industriels », constate Arnaud Gossement, avocat spécialisé en droit de l’environnement . Cependant, « faire des cartes ne suffit pas. Il faut aussi se donner les moyens d’accompagner et de contrôler les acteurs ». La France compte 1.300 inspecteurs de l’environnement pour environ 500.000 établissements industriels dont plus de 2.000 classés Seveso.

Date : 01/11/17
Auteur : Joël Cossardeaux
Source : Les Echos

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