Probable procès pour Continental dans l’affaire du Concorde

Le renvoi en correctionnelle pour homicides et blessures involontaires de la compagnie américaine Continental airlines et de deux personnages clefs de l’aéronautique française a été requis dans l’enquête sur la chute d’un Concorde qui avait fait 113 morts en juillet 2000, a annoncé le parquet de la ville.

Dans son réquisitoire signé fin février après plus de sept ans de procédure, le parquet de Pontoise (Val-d’Oise) demande aussi le renvoi devant le tribunal de deux employés de la société, John Taylor, un ouvrier et Stanley Ford, chef de l’entretien en ligne à l’époque des faits.L’accusation souhaite enfin faire juger Claude Frantzen, ancien responsable de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), et Henri Perrier, 77 ans, personnalité marquante de l’histoire du supersonique franco-britannique.

Henri Perrier participa au premier vol de Concorde en mars 1969 en tant qu’ingénieur navigant et fut chef des essais en vol de 1979 à 1989, avant d’être directeur du programme Concorde. Un non-lieu est en revanche demandé pour Jacques Hérubel, autre ancien directeur du programme Concorde.

Un juge d’instruction décidera de suivre ou non ces réquisitions.Le procès, s’il est confirmé par son ordonnance, ne devrait pas se tenir avant fin 2008 ou début 2009, pour des questions d’organisation. Il est susceptible de conduire à une amende pénale pour la compagnie américaine et à de lourds dommages et intérêts.Le Bureau enquêtes accident (BEA) français a établi que l’origine de l’accident était l’éclatement d’un pneu avant droit du Concorde, provoqué au décollage de Roissy par une lamelle en titane de 43,5 cm provenant d’un avion de Continental Airlines qui avait décollé juste avant.

Des débris du pneu projetés contre l’aile et dans le réacteur du Concorde ont endommagé un moteur et provoqué une perforation d’un réservoir ainsi qu’une fuite de kérosène, ce qui a causé un incendie, ont conclu les enquêtes judiciaire et administrative.L’appareil n’était plus contrôlable et deux minutes plus tard, il s’écrasait sur un hôtel, faisant 113 morts, dont 109 passagers, principalement allemands, et membres d’équipage.

DERNIER VOL EN 2003

L’appareil de Continental en cause a été retrouvé et examiné aux lendemains du drame aux Etats-Unis. Il s’agit du DC-10 immatriculé N13067, qui avait décollé cinq minutes avant le Concorde pour effectuer le vol COA55 Paris-Newark (New York).Les enquêteurs ont examiné l’avion et établi qu’une pièce mécanique, une "bande d’usure", manquait sur un moteur. La fixation de cette pièce par John Taylor le jour des faits est supposée avoir été défectueuse puisque, selon le BEA, elle avait déjà été changée à deux reprises avant la catastrophe.

La DGAC et les cadres du programme Concorde ont été mis en cause pour leur négligence supposée dans des rapports d’experts remis à la justice.L’Aérospatiale, devenue EADS, avait en effet répertorié officiellement 67 accidents de pneus entre 1979 et 2000 sur Concorde, dont sept avec perforation des réservoirs, situés sous l’aile de l’avion.

L’Aérospatiale n’aurait, selon l’accusation, rien entrepris jusqu’en 2001, ni pour renforcer la protection des réservoirs, ni pour améliorer celle des pneus, ce qui est retenu contre la DGAC au titre de sa mission de contrôle.

L’incident le plus significatif concernant les pneus de l’appareil s’est produit à Washington, le 14 juin 1979. Des pneus du train d’atterrissage avaient éclaté au décollage, perforant les ailes et provoquant une fuite de kérosène et un début d’incendie.

Appareil mythique de l’histoire de l’aéronautique, le Concorde, avion de ligne le plus rapide du monde, fut très vite handicapé par les chocs pétroliers, qui ont limité sa carrière commerciale aux compagnies Air France et British Airways, et aux vols de luxe transatlantiques.La catastrophe de Gonesse a accéléré sa fin, déjà programmée, et il a effectué son dernier vol commercial le 24 octobre 2003 sous les couleurs de British Airways.

L’Express, par Thierry Lévêque, le 11 mars 2008.


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