Les petits fantômes d’Allinges

Dix ans après la mort de 7 enfants sur un passage à niveau, L’Express est retourné en Haute-Savoie rencontrer les habitants.

Du passage à niveau d’Allinges, il ne reste presque rien. Quelques mètres de bitume entre deux rails, des herbes folles, un muret blanc. Et cette pierre avec les visages de Benoît, Tom, Natacha, Fanny, Yannis, Timothé et Léa. 12 ans, ­parfois 13. Morts un après-midi de juin 2008, lorsque le TER Evian-­Genève a heurté leur car, bloqué sur les voies. Sept enfants dont le souvenir plane sur ce bout de Haute-Savoie, niché en bordure du lac Léman et de la Suisse.

Depuis dix ans, les parents, les enfants survivants, les enseignants et leurs proches ont appris à vivre malgré tout, à tenir la douleur à distance. Mais, en décembre dernier, l’accident de Millas, près de Perpignan, qui provoque la mort de six enfants dans des circonstances proches, les ramène à leurs pires heures. Ils devinent les souffrances que traversent ces familles qu’ils ne connaissent pas, ils en veulent à la SNCF de ne pas sécuriser plus vite ses passages à niveau, ils savent le difficile chemin de la reconstruction qui attend ces frères de tragédie.

Après la souffrance, une vie ailleurs

En Haute-Savoie, les enfants rescapés ont été les premiers à imaginer un après. La vie a poussé ces élèves du collège de Margencel, près d’Allinges, devenus jeunes adultes vers un ailleurs indifférent à leur passé. Aujourd’hui, à 22 ou 23 ans, ils terminent leurs études ou se lancent dans le monde du travail. Ils ont changé de lieu de vie, comme Tristan, installé à Annecy depuis un an : "J’avais besoin de quitter Thonon, je n’avais plus envie de voir ce collège tout le temps. Avancer, c’est aussi bouger." "On était en cinquième, en pleine éducation. On a changé d’école, de ville, la vie nous a obligés à suivre, ça a peut-être été notre chance", renchérit un de ses camarades. La plupart aspirent à l’oubli et regrettent que, sur Internet, leurs noms apparaissent toujours en lien avec Allinges. "Avec mes nouveaux amis, je ne parle pas spontanément de l’accident", reconnaît Guillaume.

Et lorsqu’ils l’évoquent, ils parlent du retour au collège ou des sorties organisées pour leur changer les idées, mais glissent sur le drame lui-même et les moments douloureux. Ceux-là - et ils furent nombreux -, ce sont les parents qui les racontent. Anne, une maman, raconte au présent, comme si elle revivait ces instants : "Mon fils A. veut quitter l’hôpital de Grenoble pour assister aux obsèques. Chaque passage à niveau que nous traversons est une épreuve. Il hurle".

Un mois après l’accident, Eric Jandin, le professeur d’histoire-géographie qui a organisé la sortie, se suicide, rongé par la culpabilité. Cette nouvelle tragédie laisse les enfants désemparés. Ils s’accrochent à des adultes pas plus vaillants qu’eux. Les collègues d’Eric Jandin s’en veulent de n’avoir rien perçu. La veille encore, certains ont passé la soirée avec lui. Des parents sont en colère. "Oui, je lui en ai voulu de son geste, reconnaît David, un père. Il est survenu au moment où ma fille surmontait le premier choc et l’a replongée dans la douleur." Par pudeur, les enfants parlent peu, mais les signes de détresse sont là. Une des collégiennes, blessée, a besoin de dormir avec sa mère, elle ne veut plus rester seule à la maison, les parents s’organisent pour être là à tour de rôle. Deux ans plus tard, elle doit être hospitalisée, elle ne pèse plus que 38 kilos. Elle entame une psychothérapie et devient végétarienne, un choix lié aux images qu’elle conserve de l’accident.

Pour les adultes, le drame à l’infini

Les enfants sont allés de l’avant, les adultes sont moins oublieux. Leurs vies ont, en apparence, moins changé. Ils n’ont que rarement déménagé, vivent toujours dans l’un des trois villages mitoyens. Chaque jour, ils rencontrent des parents d’enfants décédés et passent sur des lieux qui leur rappellent le drame. Parfois, ils croisent le chauffeur du car. Aujourd’hui encore, lorsqu’ils parlent de ce jour-là, les voix tremblent et les larmes affleurent. Ils commencent avec les mêmes mots : "Je m’en souviens comme si c’était hier", parce que c’est ainsi qu’ils le ressentent. Par bribes, par fragments, ils racontent à vif la part d’intime de l’événement collectif. Eric Charvet est à Mâcon lorsqu’il entend parler de la collision sur France Info. La veille, Yannis, son fils, lui a parlé de la sortie. Il saute dans sa voiture et arrive pour lire sur le visage des gendarmes que Yannis est décédé.

Patrick Bermond, alors principal du collège, se souvient de ce coup de fil de la secrétaire de la compagnie de cars, qui lâche sans précaution : "Il y a eu un grave accident, au moins 25 morts." Laurence apprend la nouvelle par son ex-mari, arrivé très tôt sur place. Il a récupéré l’un de ses fils jumeaux, l’autre est introuvable. Il faudra attendre de longues minutes pour être rassuré. Jean-Pierre Fillion, alors maire d’Allinges, est en réunion à la préfecture d’Annecy lorsqu’il est alerté. Sonné, il est incapable de conduire, le sous-préfet le ramène. Plus tard, il accompagne le colonel de gendarmerie Olivier Kim dans le garage où a été organisée une chapelle ardente de fortune. Désormais général et commandant de la région de gendarmerie Bourgogne-Franche-Comté, ce dernier se souvient : "Cela m’a marqué pour ma vie d’homme et d’officier : j’ai dû faire l’indicible, annoncer la liste des victimes à leurs familles."

Dans la tension de l’heure, Marie-Thérèse Favre, professeur de SVT, présente dans le car, hausse la voix contre une maman qui perd ses nerfs - "Ce n’était pas le moment devant tous les enfants" -, mais rassure doucement un élève qui lui demande : "J’ai un contrôle demain. Comment je vais faire ?" Ils ont gardé des traces minuscules de ce jour. Jean-Pierre Fillion a toujours la carte de visite au dos de laquelle il a noté la liste des sept noms d’une main tremblante. Marie-Thérèse Favre retrouve ses notes prises lors des premiers jours pour tenter de garder pied. S’y mêlent "nuit blanche", "cérémonie au gymnase", mais aussi "On emmène Thomas à Annemasse pour son bac à 6 heures du matin" et cette "envie de sucré (religieuse au chocolat)" quand les heures deviennent trop lourdes.

Une série de hasards et un monceau de regrets

Il faut apprendre à vivre avec la culpabilité et la litanie des "si seulement...". Avec cette décision de maintenir la sortie de fin d’année des 5e 2 et 5e 5 du collège de Margencel malgré la météo exécrable, alors qu’elle a déjà été repoussée deux fois pour cause de mauvais temps. Cette place qu’on a échangée avec un copain et qui lui a été fatale. Ces quelques minutes de retard du TER. Ce contournement de Thonon qui aurait évité au car le franchissement du passage à niveau, mais qui ne sera achevé que trois semaines plus tard. Une série de hasards qui ont conduit à la tragédie et que certains ne peuvent s’empêcher d’assumer. Jean-Pierre Fillion, l’ancien maire d’Allinges, est de ceux-là : "J’aurais presque voulu être condamné, ça m’aurait peut-être soulagé", dit-il. L’absence de reproches des parents l’a aidé à tenir.

La fragilité des hommes est palpable. Née de la même tragédie, mais chaque fois différente. La plus évidente est celle des enfants rescapés. A la rentrée qui suit l’accident, la plupart d’entre eux ont souhaité rester dans le même collège. Guillaume, âgé aujourd’hui de 22 ans, se souvient de ces chaises vides dans une classe où près d’un quart des élèves sont décédés. Tristan, l’un de ses camarades, trouve la classe "toute petite". A 13 ans, on se croit immortel. Eux ont rencontré la mort si jeunes, avec une singulière violence. Aujourd’hui encore, on ne le dit qu’à mi-mot pour ne pas les accabler, mais l’année est dure. Protecteurs à l’égard des enseignants présents dans le bus, ces élèves mènent la vie infernale aux autres. Le premier conseil de classe est un casse-tête : peut-on sanctionner des gamins qui ont vu la mort de si près ?

Les adultes se découvrent vulnérables, sans repères. Quelques mois après l’accident, des parents et des enseignants fondent une association. Il s’agit de gérer les dons arrivés spontanément, il s’agit surtout de se retrouver, de parler de ces enfants avec qui la communication est coupée. "On ne comprenait pas leurs réactions. Et nos propres douleurs n’étaient pas prises en compte, y compris par nous-mêmes", poursuit David, un père. Mais peut-on exprimer son mal-être quand on a encore son enfant et que d’autres ont perdu le leur ? Peut-on s’opposer au nom de l’association - "Sourires des anges" -, choisi par les parents des enfants ­décédés, parce qu’il a une connotation religieuse ? Peut-on refuser d’accueillir la femme du professeur qui s’est suicidé parce qu’on en veut à son mari de son geste ? Les douleurs se superposent, se concurrencent, se heurtent parfois. Il faut trouver les mots pour apaiser les esprits. Patricia Jandin, la veuve d’Eric, est toujours membre, discrète mais active, du bureau : "Ils attendaient Eric, ils ont accepté Patricia, c’est ça qui est beau." "J’ai beaucoup appris sur la tolérance et la bienveillance durant ces premiers mois", note David.

Le procès, une thérapie pour beaucoup

Dans le drame d’Allinges, le procès est un moment clef. La fin d’une histoire pour certains, le début d’une nouvelle pour les autres. Un apaisement pour tous. Benjamin Deparis, le président du tribunal de Thonon, joue un rôle crucial. Lorsque le 3 avril 2013, cinq ans après l’accident, le dossier 20130109 arrive enfin devant la justice, il veille à tout. Il plaide pour que l’audience se déroule au ­palais de justice et non dans une salle communale, plus grande mais moins solennelle. Il garantit l’équilibre entre les trois prévenus - le chauffeur du car, auquel les enfants sont très attachés, la SNCF et Réseau ferré de France (RFF) comme personnes morales - et les 235 parties civiles. Il prévoit une journée et demie pour l’expression des victimes, mais accorde des places dans les premiers rangs pour les experts de la SNCF. Il demande un transport sur les lieux pour éclaircir toutes les zones d’ombre et prend soin de répondre à l’ensemble des questions. Pourquoi ne parle-t-on pas du trajet choisi par le chauffeur ? Pourquoi les élus locaux n’ont-ils pas été poursuivis ?

Il connaît son dossier sur le bout des doigts, a appris le prénom des enfants et ceux des parents, le moindre détail de leur vie. Lorsqu’il entend les parents d’enfants décédés, il demande qu’il n’y ait, devant lui, ni dossier ni ordinateur pour faciliter la parole. Le 26 juin, le jugement est rendu : le chauffeur est condamné à deux ans de prison avec sursis pour "faute simple d’imprudence et de maladresse" ; la SNCF et RFF, à respectivement 200 000 et 400 000 euros d’amende pour "manquement à une obligation de sécurité". Personne ne fait appel.

"J’avoue, je n’y croyais pas, mais ce procès a été une thérapie", ­indique Patrick Baptendier, porte-­parole de l’association Sourires des anges. Les professeurs présents dans le car découvrent ce qu’ont ressenti leurs élèves, les enfants dévoilent ­devant leurs parents des éléments qu’ils ont cachés jusqu’alors. "Avec ma mère, on parlait, mais pas forcément en profondeur. Avec mon témoignage, elle a pu savoir des choses que je ne disais pas spontanément", raconte Guillaume. C’est ainsi que Laurence a entendu parler des images d’un camarade décédé de son fils qui le hantaient depuis des années. L’avancée est aussi juridique : pour la première fois, le préjudice d’attente et d’inquiétude est reconnu et indemnisé pour les proches restés sans nouvelles pendant plusieurs heures. Un préjudice qui sera pris en compte lors des attentats de Paris et de Nice.

Trouver d’autres raisons de continuer

Ce moment passé, nombre de familles prennent leurs distances. Les jeunes sont alors en terminale et s’apprêtent à commencer leurs études supérieures. Une partie des adultes s’éloignent de l’association Sourires des anges, très active dans la préparation du procès, mais dont ils ne perçoivent plus la vocation. Une manière de détacher leur vie de la tragédie d’Allinges. D’autres, au contraire, veulent poursuivre son action avec l’idée que de ce drame peuvent être tirées des leçons pour améliorer la sécurité ferroviaire. "C’est toujours l’horreur dans ma tête. Mais, avec l’association, on avance, on grandit, il sort des choses positives de cette tragédie", souligne Blandine Chabert, membre du bureau, maman d’une jeune fille blessée. Présidée par Alain Duchamp, le papa de Léa, la structure fait pression sur la SNCF pour promouvoir ses idées, comme la mise en place de détecteurs de masse inerte sur les voies en amont des passages à niveau ou l’inscription "barrières cassables" à l’intérieur. Elle dénonce inlassablement les zones dangereuses, comme ce collège d’Annemasse où les élèves traversent des voies entre le parking des cars et l’entrée de l’établissement.

Au fond, les uns et les autres ne cherchent rien d’autre que la force de reprendre le cours d’une vie qui n’aura plus rien de normal. Certains la puisent dans la colère à l’égard d’institutions qui n’ont que faire de leur douleur. Déjà, au moment de l’accident, l’attitude des pouvoirs publics avait heurté. Le jour même du drame, les enfants qui n’étaient pas blessés mais très choqués n’ont pas pu rejoindre immédiatement leurs parents. Ils ont attendu pendant vingt minutes dans un car l’arrivée de Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l’Intérieur. Elle tenait à les voir. Plus tard, c’est le sous-préfet qui prévoit d’installer la chapelle ardente dans le gymnase du collège. Dans un sain réflexe, le principal refuse. Il ne veut pas que ses élèves aient en tête cette image, plus tard, lorsqu’ils reprendront le sport. Le ton monte, l’évêque intervient, la chapelle ardente reste à l’église d’Allinges. Il y a aussi le souvenir de ce moment de recueillement raccourci pour permettre la visite de Nicolas Sarkozy. Présidence de la République contre deuil des familles, irréconciliables priorités.

La colère comme exutoire

Colère aussi contre cette administration de l’Education nationale, qui, au bout de quelques mois, n’a plus guère prêté attention aux enseignants présents dans le car. Marc-Laurent Lavy, professeur d’allemand contractuel, a continué à enseigner, passant d’établissement en établissement. Il s’est éloigné de Thonon, vit retiré à la montagne. Il y a trois ans, il est revenu au collège de Margencel. Le choc a été tel qu’il s’est perdu dans les couloirs. Lui qui a un handicap physique et psychologique attesté par le jugement de 2013 aimerait que son statut de travailleur handicapé soit reconnu pour obtenir un allègement de ses horaires. Dix ans après l’accident, son dossier est toujours en attente au rectorat. Il n’est pas le seul à ressentir cet abandon. Béatrice François, professeur d’EPS, qui a repris son travail sans s’arrêter, regrette que l’Education nationale n’ait jamais eu un geste de reconnaissance. Colère contre l’actuel maire d’Allinges, élu en 2014, qui aimerait dissocier le nom de sa commune du souvenir de l’accident et trouve que la suppression du passage à niveau, décidée par son prédécesseur mais réalisée en 2015, a trop endetté sa ville.

Colère, enfin, contre ces assurances qui ne jouent pas le jeu. Le jeune A., grièvement blessé à la mâchoire, doit batailler avec la sienne, qui a pourtant été condamnée à prendre en charge tous ses frais dentaires jusqu’à ses 60 ans. "Chaque facture est une épreuve. Il faut plus de six mois de courriers pour obtenir un remboursement", témoigne sa maman. "Ils attendent la moindre inattention pour cesser de me rembourser. C’est humiliant", ajoute A.

A la colère, d’autres préfèrent un changement d’horizon. Patrick Bermond, le principal du collège, qui ne parvient plus à dormir dans son logement de fonction, demande sa mutation à la fin de la première année. Il rejoint un lycée professionnel à Annecy. Deux ans plus tard, Marie-Thérèse Favre, professeur de SVT, accompagne des élèves en sortie, le bus accroche dans un virage, elle craque. Elle décide de préparer sa reconversion, elle s’occupe désormais d’un centre de documentation dans un lycée hôtelier. Mais rien n’y fait. Tous vivent à l’infini avec le drame. Marie-Thérèse Favre appréhende toujours les trajets en car lorsqu’elle part avec la chorale dont elle fait partie. Jean-Pierre Fillion, l’ancien maire d’Allinges, ne peut pas entendre les sirènes des pompiers sans penser "catastrophe".

Les plus durement touchés s’épuisent de trop de chagrin. Les premiers mois, la professeur de sport Béatrice François passe régulièrement voir les parents des victimes lors de ses après-midi libres, pour compenser ce sentiment envahissant de ne pas avoir été à la hauteur le jour du drame. Tristan Houdebert, qui gérait un magasin d’antiquités, n’en est plus capable après la mort de Tom, son fils. Tragique ironie de l’histoire, il doit reprendre son métier initial, chauffeur de car. Il en profite pour essayer d’en savoir plus sur l’accident, tant est grande sa colère à l’encontre de ceux qui "ont tué [son] gamin".

Pour ne pas se laisser submerger par le chagrin, Eric Charvet se noie dans le travail. Et s’accroche à un engagement pris entre son fils et lui : "Pour mon boulot, je faisais beaucoup de kilomètres, j’avais parlé à Yannis du risque que j’avais d’avoir un accident et que, si ça arrivait, la vie continuerait, qu’il faudrait rester droit. Alors, quand je l’ai vu ce jour-là dans sa housse, je me suis dit : ’Tu ne peux pas t’écrouler, tu lui as demandé d’être digne.’" Il ajoute doucement : "Ce qui est insupportable, ce n’est pas de voir les copains de Yannis grandir, c’est de changer de temps pour parler de son enfant."

Entretenir la mémoire sans s’enfermer dedans

La vie qui continue, c’est aussi le souvenir qui s’estompe, les regards qui se détournent lorsque l’on parle de la tragédie, le silence qui s’installe alors que la blessure reste béante. Au collège, les mots, les fleurs, les dessins ont d’abord été déposés dans le hall, puis déplacés dans une "salle du ­souvenir". Quelques mois plus tard, lors de vacances scolaires, la pièce a été vidée. Béatrice et Georges François, professeur de sport et CPE, ont ­toujours trois cartons à la maison, pleins de ces hommages.

Lors de la première saison après l’accident, au Stella Basket ­Thonon, le club que fréquentait Yannis depuis un an, aucun de ses coéquipiers n’endosse le maillot n° 10, le sien, et tous reprennent le cri de ralliement qu’il avait imaginé en début d’année : "C’est ça qu’on veut !" "Pour eux, ces gestes signifiaient qu’il était là", souligne ­Hélène Catelain, l’entraîneuse. Chaque année, depuis 2009, son papa, basketteur d’un bon niveau, organise avec le club un tournoi en sa mémoire. Au milieu de la journée, ses compagnons de parquet disputent le "match des copains". Mais, lors des deux dernières éditions, il n’a pas pu avoir lieu, les coéquipiers étaient trop dispersés, jusqu’en Australie et en Nouvelle-Zélande. En 2018, le tournoi est prévu le 2 juin, un samedi et jour de la date anniversaire du décès de Yannis, Eric Charvet espère qu’ils pourront être au rendez-vous.

Entretenir le souvenir sans s’enfermer dedans. Tourner doucement la page sans rien effacer. L’équilibre est difficile à trouver. Le 2 juin, l’association Sourires des anges organisera une marche blanche, du passage à niveau aux châteaux des Allinges. C’est là que les collégiens ont pique-niqué et passé leurs dernières heures d’enfants avant l’accident. C’est là que, en juin 2009, a été inaugurée une stèle en leur mémoire. Juste derrière, sur le mur, un peu à part, une plaque en forme de pomme rend hommage à Eric Jandin. Un lieu symbolique pour rappeler que, avant Millas, il y a eu Benoît, Tom, Natacha, Fanny, Yannis, Timothé, Léa et leurs camarades, Eric Jandin et ses collègues, les parents, les proches. Toute une communauté dont la vie n’a plus jamais été la même après ce lundi de juin 2008.

Source : L’Express
Auteur : Agnès LAURENT
Date : 04/04/2018

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