La rue Copernic attend l’extradition

C’était le premier attentat contre les juifs en France depuis la fin de la guerre. Quand la moto piégée a fait voler en éclats toute la rue Copernic, le 3 octobre 1980 à Paris, la France a été sous le choc. Quatre passants tués, des dizaines de blessés, mais le but des terroristes était de faire un massacre, la bombe devait exploser à la sortie de l’office de shabbat, quand des centaines de personnes sont dans la rue. La minuterie n’a pas bien fonctionné.

Ce fut un choc politique, le président Giscard d’Estaing ne rentrant pas de la chasse, son Premier ministre lâchant qu’on visait des juifs mais qu’on a tué des « Français innocents ». Un demi-million de manifestants allaient défiler derrière une banderole « Le fascisme ne passera pas », attribuant à tort l’attentat aux néonazis. Six mois plus tard François Mitterrand était élu président.

Respectable. Longtemps, on a cru que ce crime allait rester impuni. Oublié dans les méandres proche-orientaux. Mais les enquêteurs français n’ont jamais abandonné et, vingt-sept ans après, les policiers, les agents de renseignements et le juge d’instruction Marc Trévidic ont pu donner le nom et l’adresse de Hassan Diab, poseur de bombes présumé. Respectable professeur de sociologie à Ottawa, Canada. Le 5 novembre 2008 les juges Trévidic et Jannier lancent un mandat d’arrêt international et le 10 décembre demandent son extradition. Hassan Diab est arrêté puis remis en liberté conditionnelle. Le tribunal de première instance canadien a accepté le principe de l’extradition, mais Diab fait appel, affirmant qu’il est victime d’une homonymie. Le 4 novembre prochain, la cour d’appel d’Ottawa doit se prononcer sur son extradition.

Hassan Diab a-t-il fabriqué et installé les explosifs sur la moto garée en face de la synagogue ? En tout cas, il correspond aux portraits-robots d’un certain Alexander Panadriyu, muni d’un passeport chypriote, qui a acheté une moto, loué une voiture, payé une chambre d’hôtel, où il a couché avec une prostituée. Les experts français ont comparé l’écriture de Hassan Diab avec la fiche d’hôtel et les fiches de location de la voiture. Le juge Trévidic a interrogé les femmes pour croiser des détails, le Chypriote est circoncis, Diab aussi. Et surtout, le vrai passeport de Diab, retrouvé à Rome sur le neveu de Selim Abou Salem (dirigeant de l’organisation terroriste FPLP-OS), montre qu’il est entré en France le 20 septembre et reparti le 7 octobre 1980, comme le commando. Dissidence du FPLP (Front populaire de libération de la Palestine de Georges Habache), le FPLP-OS (opérations spéciales), organisation palestinienne marxiste-léniniste, était basé à Beyrouth.

Paisible. Après leurs attentats meurtriers de Copernic et d’Anvers, les terroristes vont mener une vie paisible. A l’image de Hassan Diab qui part avec sa femme étudier à l’université américaine de Syracuse puis s’installe au Canada, où il devient professeur.

Le juge Trévidic attend les conclusions de la justice canadienne, mais il n’a pas renoncé à traquer les autres membres de ces commandos de tueurs dans le monde entier : « On est loin d’avoir fini. »

libération.fr avec Annette LÉVY-WILLARD - 30 septembre 2013


Nous soutenir

C’est grâce à votre soutien que nous pouvons vous accompagner dans l’ensemble de vos démarches, faire évoluer la prise en charge des victimes par une mobilisation collective, et poursuivre nos actions de défense des droits des victimes de catastrophes et d’attentats.

Soutenir la FENVAC

Ils financent notre action au service des victimes