Crash du Rio-Paris : vers un procès d’Air France et d’Airbus

Le constructeur et l’exploitant de l’A330 qui s’est écrasé en juin 2009 dans l’Atlantique, faisant 228 morts, sont mis en examen pour homicides involontaires dans cette enquête.

L’enquête judiciaire sur le crash du vol Rio-Paris touche à sa fin. Les juges d’instruction Sylvia Zimmermann et Yann Daurelle ont annoncé ce mercredi, lors d’une réunion d’information avec les parties civiles au palais de justice de Paris, qu’ils « disposaient des éléments suffisants pour ordonner le renvoi d’Air France et d’Airbus » devant le tribunal correctionnel, a indiqué un participant à Libération.

Les juges d’instruction semblent donc déterminés à ce qu’Airbus et Air France soient jugés pour leurs responsabilités présumées dans ce crash, qui a fait 228 morts. Avant de signer l’ordonnance de renvoi, il faut toutefois que les derniers recours de procédures soient purgés. Air France a en effet déposé un recours en nullité devant la chambre de l’instruction le 14 mai dernier pour contester le rapport de contre-expertise réalisé à la demande d’Airbus. Signe qu’ils veulent aboutir vite, les juges ont annoncé mercredi qu’ils allaient refuser les nouvelles demandes de contre-expertises formulées par Air France et le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) – toujours pour tenter de contrer le rapport réalisé à la demande d’Airbus.

UN CONTRE-RAPPORT QUI CHARGE LES PILOTES

Ce document, notifié aux parties le 12 mai, avait ulcéré le SNPL, Air France et les familles des victimes. Le rapport de contre-expertise chargeait en effet presque exclusivement les pilotes, présentés comme les principaux responsables de l’accident. Et minimisait les facteurs structurels du crash, notamment les défauts des sondes Pitot de mesure de vitesse, dont le givrage intempestif avait provoqué la séquence d’événements menant à la perte de contrôle de l’appareil. Ce contre-rapport contredisait le diagnostic des deux rapports précédents, réalisés à l’été 2012 par le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA, qui dépend du ministère des Transports) et par les premiers experts judiciaires. Ces documents concluaient tous deux, avec des nuances, au fait que la responsabilité du crash était partagée entre les pilotes d’une part ; Airbus, Air France et les autorités aériennes d’autre part.

L’association Entraide et solidarité AF447, qui représente les victimes françaises, redoutait que la juge ne s’appuie sur le contre-rapport pour blanchir Airbus et Air France. Ils ont d’ailleurs manifesté mercredi sur les marches du palais de justice de Paris, juste avant leur rencontre avec Sylvia Zimmermann, pour dénoncer ce « rapport complètement bidonné » en faveur de l’avionneur. « Il faut qu’Airbus soit à la barre. S’ils bénéficiaient d’un lieu, ce serait extrêmement grave », indiquait lundi à Libération la présidente d’Entraide et solidarité AF447, Danièle Lamy.

Mais les juges d’instruction ont manifestement estimé que si les pilotes ont une part de responsabilité, Air France et Airbus devaient répondre des leurs. Outre le fait que les sondes défectueuses n’ont pas été remplacées avant le crash malgré plusieurs alertes (elles l’ont été après), le premier rapport d’expertise judiciaire pointait les systèmes « déroutants » de l’A330 en cas de panne, et le fait que les procédures à suivre par les pilotes en cas de panne étaient mal adaptées. Les experts reprochaient par ailleurs à Air France d’avoir réagi de manière « tardive et inefficace » aux incidents de sondes survenus avant le crash, en n’informant pas suffisamment ses pilotes du danger.

Yann PHILIPPIN - libération.fr - 2 juillet 2014


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