Concorde : le procès s’achève sur fond d’affrontement Air France/Continental

Le procès du crash du Concorde en 2000, dont le jugement sera rendu le 6 décembre, s’est achevé vendredi avec la plaidoirie de la défense de Continental Airlines, qui a vivement attaqué l’exploitante du supersonique Air France.

Les quatre mois d’audience visaient à déterminer les responsabilités éventuelles de la compagnie américaine, de deux de ses employés et de trois anciens responsables français de l’aéronautique, dans l’accident qui a fait 113 morts le 25 juillet 2000 à Gonesse (Val-d’Oise).

Selon l’accusation, un DC10 de Continental Airlines aurait déclenché la catastrophe en perdant une lamelle sur la piste de décollage du Concorde, faisant éclater un pneu qui a perforé un réservoir, menant à l’inflammation du carburant.

"Dès le lendemain de l’accident, on avait le coupable !", a lancé l’avocat de la compagnie américaine, Me Olivier Metzner, après avoir longuement mis en cause l’instruction et le travail des experts judiciaires.

"C’est la première fois de ma vie que je plaide pour un bout de ferraille", a-t-il déclaré, brandissant des pièces de même dimension que la "bande d’usure" incriminée et ironisant sur "la lamelle la plus connue du monde, cet assassin de 113 personnes".

Reprenant la thèse qu’il a défendue tout au long du procès, il a rappelé que "16 témoins" avaient vu l’avion en feu environ 700 mètres avant qu’il ne roule sur la lamelle.

Selon lui, l’avion aurait été fragilisé par l’absence d’une pièce du train d’atterrissage, l’entretoise, et par des irrégularités sur la piste.

Il a également évoqué la "surcharge" de l’appareil, raison pour laquelle "il est évident qu’Air France ne pouvait pas laisser l’avion décoller".

Selon Me Metzner, cette dernière n’aurait pas dû être partie civile, mais sur le banc des prévenus.

L’affrontement entre les deux compagnies est allé crescendo durant quatre mois. La semaine dernière, Air France a imputé la responsabilité de l’accident à la seule Continental, lui réclamant 15 millions d’euros d’indemnités.

Ces derniers mois, "Continental est devenue la première compagnie mondiale. Cela dérange peut-être Air France", a avancé Me Metzner, évoquant "un procès en concurrence déloyale".

Montrant les conclusions déposées par la compagnie française au tribunal, il a affirmé qu’elle s’y trompe "quatre fois" de date pour l’accident en parlant du 20 juillet. "Quel mépris pour les victimes ! le 25 juillet, Air France a causé la mort de 113 personnes", a-t-il lancé.

Pour leur défense, les trois prévenus français, accusés de n’avoir pas tiré les leçons des incidents de pneus ayant émaillé la carrière du Concorde dès 1979, ont pour leur part maintenu que le crash était "imprévisible".

Le parquet a requis 175.000 euros d’amende à l’encontre de Continental pour homicides involontaires, et 18 mois de prison avec sursis contre ses deux employés, John Taylor, 42 ans, accusé d’avoir mal fixé la lamelle et son chef d’équipe Stanley Ford, 71 ans, qui a validé la réparation sans la contrôler.

Le procureur Bernard Farret a demandé deux ans de prison avec sursis pour l’ancien directeur du programme Concorde Henri Perrier, 80 ans, et la relaxe de son ancien collaborateur Jacques Herubel, 74 ans, et l’ex-cadre de la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC) Claude Frantzen, 72 ans.

Les grandes absentes de ce procès auront été les familles des passagers allemands, indemnisées par Air France et ses assureurs moins d’un an après l’accident.

Linternaute, le 28 mai 2010.


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