Attentats de Nice : « Ma cliente a pris ça comme une gifle »

Une victime indirecte des attentats de Nice conteste le montant de son indemnité, jugé trop faible. Son avocat, Me Morain, va déposer une requête devant le tribunal de grande instance de Créteil et explique pourquoi.

Le 14 juillet 2016, Natacha Buchet a perdu sa mère. Jacqueline, 64 ans, est décédée sur la promenade des Anglais de Nice, fauchée dans l’attaque terroriste au camion qui a fait 86 morts. Comme les autres victimes et familles de victimes de l’attentat, Natacha a reçu sa proposition d’indemnisation définitive, envoyée par le fonds de garantie. Celle-ci est de 30.000 euros. C’est 10 fois moins que ce que son avocat exigeait. La maman célibataire va déposer une requête devant le tribunal de grande instance de Créteil pour contester le montant. Son avocat Éric Morain a répondu aux questions.

Que reprochez-vous au fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme ?
La proposition d’indemnisation reçue par le fonds de garantie ne justifie que le préjudice moral, pas le préjudice économique. Et encore. Après l’attentat, on a dit à ma cliente que sa mère ne faisait pas partie des victimes. Elle n’a pas eu de nouvelle d’elle pendant quatre jours, puis a reçu un appel lui indiquant qu’en fait si. C’est un raté qui doit être indemnisé. Je suis en colère. On a reçu une offre formatée où l’on n’a même pas pris le soin de donner une apparence personnalisée. Une offre à 10 % de ce que l’on demandait. Ma cliente a pris ça comme une gifle. C’est une vaste blague. On ne veut pas voir qu’au-delà de la peine, ce que la perte d’un proche, cause d’un point de vue économique.

Effectivement, Natacha Buchet a expliqué dans son dossier que sa mère s’occupait de ses enfants, justifiant ainsi un préjudice économique. N’y a-t-il pas un tabou autour de ce type de demande ?
Il n’y a pas de tabou à avoir. Tous les jours devant la justice, sur des accidents du travail ou de la route par exemple, il y a une liste des préjudices économiques en découlant qui est établie. Ma cliente a très peu de ressources et élève seule ses enfants. Le fait que sa mère gardait ses enfants, lui permettait de faire des économies et de suivre une formation à côté. La somme de 330.000 euros exigée, je l’ai calculé par rapport au préjudice moral, à l’âge de ma cliente, de ses enfants et de sa situation. Une mère, ça n’a pas de prix, mais il faut trouver le juste milieu entre l’aumône et une indemnisation démesurée à l’américaine.

Le cas de Natacha Buchet reflète-t-il un problème plus général ?
Bien sûr. Le fonds de garantie tente de préserver son budget au détriment d’un examen personnel et particulier des situations des victimes. Dans le contexte actuel, avec la multiplication des attentats, il y a un problème de budget : il n’est pas ‘no limite’.

Quand on a reçu la proposition définitive d’indemnisation, celle-ci était accompagnée d’un chèque équivalant à 80 % du montant proposé. Encaissable immédiatement. C’est une technique pour appâter les gens. Une personne mal conseillée et dans le besoin va signer la proposition pour pouvoir encaisser le chèque, alors qu’elle pourrait l’encaisser et faire un recours en justice. Ce n’est écrit nulle part, mais on peut refuser l’offre et quand même toucher une partie de l’argent. C’est une stratégie pour que les gens ne leur demandent pas plus.

Source : 20minutes.fr
Auteur : Marie de Fournas
Date : 26 février 2017

Crédit photos : Source : 20minutes.fr Auteur : Marie de Fournas Date : 26 février 2017

Nous soutenir

C’est grâce à votre soutien que nous pouvons vous accompagner dans l’ensemble de vos démarches, faire évoluer la prise en charge des victimes par une mobilisation collective, et poursuivre nos actions de défense des droits des victimes de catastrophes et d’attentats.

Soutenir la FENVAC

Ils financent notre action au service des victimes